Loi 3DS : une scénette dans une pièce de 5 actes ?

Loi 3DS : une scénette dans une pièce de 5 actes ?

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L’étude du projet de loi 3DS interroge : les règles du théâtre classique élaborées durant la seconde moitié du XVIIème siècle trouvent-elles à s’appliquer à la longue route semée d’embuche de la décentralisation ? 

En effet, comment ne pas entrevoir une analogie entre les collectivités territoriales, dans leur rapport avec l’Etat, et les personnages des tragédies de Racine, en but à un destin qu’ils ne maîtrisent pas ? Au gré des suppressions successives de la taxe professionnelle puis de la taxe d’habitation, on peut se poser la question, avec des communes dépossédées de leur autonomie fiscale, pourtant reflet essentiel de leur attractivité et de leur bonne santé financière. De même, la gestion centralisée de la crise sanitaire telle qu’envisagée et mise en œuvre dans un premier temps n’a pas amélioré nos relations partenariales avec l’Etat. A l’inverse, l’intervention des communes, fortes de leur agilité et de leur réactivité, ont assuré, dans un second temps, le déploiement du processus vaccinal avec succès.  

La règle des cinq actes, en revanche, elle, diffère, et la loi 3DS y tient péniblement le rang de scénette. Après l’Acte I de Gaston DEFFERRE, l’Acte II de Jean-Pierre RAFFARIN, et l’Acte III du quinquennat HOLLANDE – de loin le plus chaotique – les transferts et clarifications de compétences semblent aujourd’hui à l’arrêt. Dans ce contexte, les apports de la loi 3DS apparaissent limités, notamment au regard de l’ambition affichée de simplification. Où sont les innovations managériales en matière de fonction publique territoriale ? Quid de l’élimination des doublons de compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales, sources évidentes de gabegie financière ? Quelle vision pour une relation financière stabilisée, fondée sur la responsabilité et la visibilité pluriannuelle ? 

La règle de l’unité de lieu est toutefois démentie par l’intervention bien heureuse du Sénat, qui dans sa 1re lecture, s’est traduite par des apports intéressants, que je distinguerai en deux catégories. D’une part, une logique partenariale a guidé la réécriture du texte : co-présidence des agences régionales de santé assurée par le président et le préfet de région, lutte renforcée contre les doublons administratifs, réaffirmation d’un principe de responsabilité (« qui décide paie ») … D’autre part, le grand apport du Sénat réside dans un souci d’attribution plus pertinente des compétences, selon un principe de subsidiarité : assouplissement des règles d’urbanisme et de logement, renforcement des compétences économiques et de santé au profit des départements et des régions… Nous espérons que ce travail sera pris en compte en deuxième lecture.  

La règle de l’unité d’action persiste quant à elle, puisque la promesse de différenciation ne semble pas tenue. Comme le rappelle notre collègue Françoise GATEL dans la dernière édition de la Revue du Trombinoscope, présidente (UDI) de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, la première version de ce texte se caractérisait, en la matière, par une « timidité excessive ». Celle-ci a motivé le Sénat à introduire une possibilité de délégation de compétences entre collectivités, dite « transferts à la carte ». Un tel apport va dans le bon sens, à condition que la différenciation soit synonyme de souplesse et d’adaptation du droit en fonction des contextes locaux, sans pour autant porter atteinte à l’unité – et non l’uniformité – de la République.  

Au même titre qu’« il n’est point de secrets que le temps ne révèle » (Britannicus, Acte IV, scène 4, Racine), il n’est point d’évidences que les crises ne révèlent : la double nécessité d’un approfondissement de la décentralisation, et d’une clarification des relations financières entre l’Etat et les collectivités territoriales. 

Editorial à retrouver dans le prochain numéro de L’Elu local magazine.

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