Le gouvernement vient de procéder à une réforme territoriale sans précédent dans notre histoire depuis deux siècles. Avec notamment un redécoupage régional approximatif et la suppression par moitié des cantons, l’exécutif dessine une véritable « France d’à côté ».
S’il devait y avoir un symbole de l’impréparation présidentielle et gouvernementale, c’est bien la réforme territoriale ! Tout le monde a compris que quand on est sur le fil du rasoir, sans aucune marge de manœuvre ni perspectives sur les fronts économiques et sociaux, on « gigote » pour faire illusion. Sur le fond du sujet, tout le monde est d’accord pour refondre cet indigeste millefeuille administratif tant décrié ! Comme le disait déjà François MITTERRAND en 1981 : « la France a eu besoin d’un pouvoir fort et centralisé pour se faire, elle a désormais besoin d’un pouvoir décentralisé pour ne pas se défaire ».
Aujourd’hui, c’est sur la méthode ou plutôt sur l’absence de méthode que le bât blesse !
J’ai toujours défendu l’idée d’une décentralisation moderne à travers une grande et ambitieuse réforme territoriale garante d’efficacité et d’équité, qui redéfinisse le rôle et la compétence de chaque échelon de notre démocratie locale. Malheureusement, à travers les différentes lois adoptées entre 2013 et 2014, le gouvernement a fait le choix du « tripatouillage » électoral au détriment de l’aménagement du territoire. En supprimant la moitié des cantons de France et en les redécoupant sur des bases exclusivement démographiques, l’exécutif organise la mise à mort de la représentation des territoires ruraux à des fins purement électoralistes. Quant au redécoupage régional, il a été élaboré à la va-vite, sur un coin de table, sans aucun bon sens !
Les projets de loi du gouvernement n’offrent aucune visibilité sur la réforme de l’État, les compétences et sur les ressources financières, trois pivots essentiels à une réforme territoriale réussie. Il conviendrait de promouvoir une meilleure efficacité de l’action publique à moindre coût, de mettre fin à l’enchevêtrement des structures existantes en les simplifiant et en tenant compte des spécificités territoriales, économiques et historiques qui permettent des réponses mieux adaptées entre États, régions et collectivités.
Certes, la France doit pouvoir s’appuyer sur des métropoles fortes et compétitives, visibles sur la scène internationale. Certes, la carte cantonale de notre pays a besoin d’être revue afin de rééquilibrer les écarts de populations qui peuvent exister entre deux cantons. Pour autant, l’ensemble des composantes territoriales doit être justement représenté au sein de nos collectivités territoriales. À défaut, c’est le visage même de la France qui s’en trouvera défiguré.
La décentralisation est une chance pour nos territoires et pour la République. Défendons l’idée d’une décentralisation moderne et humaniste qui puise sa force dans la complémentarité des atouts de ses territoires !
Éditorial extrait du numéro 85 du magazine Dialogues.
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